Photosensibilisation et coups de soleil

Dès l'arrivée du soleil, c'est le branle-bas de combat des crèmes solaires, couvertures et masques anti-UV chez les propriétaires de chevaux à la peau dépigmentée.

Leur peur ? Le fameux coup de soleil.

Cependant, un vrai coup de soleil (qui a pour unique cause une exposition exagérée aux rayonnements solaires) reste assez rare chez les chevaux (même à peau blanche !) et contrairement à ce que l'on pourrait penser, les coupables sont dans la majorité des cas : les plantes !

QUELQUES DEFINITIONS :

Qu’est ce qu’un coup de soleil ? C’est une inflammation de la peau causée par les UV du soleil.

Qu’est-ce que la photosensibilisation ? C’est une hyper-sensibilité de la peau face aux rayons du soleil. En cas d’exposition normale au soleil, la peau va donner une réponse disproportionnée.

Les dermatoses actiniques (= coups de soleil) dues uniquement à une surexposition aux UV sont très peu courantes, même chez un cheval qui vit uniquement au pré (à moins que l’on mette notre cheval crème totalement dépigmenté dans un pré plat sans ombre, mais la, c’est plus la faute du propriétaire que du soleil). La plupart du temps, les coupables sont des plantes qui vont rendre notre animal photosensible et vont engendrer un coup de soleil.

plante(s) photosensibilisantes + exposition normale aux UV = coup de soleil

PHOTOSENSIBILISATION PRIMAIRE :

La photosensibilisation primaire est le fait d’ingérer une plus ou moins grande quantité de plantes, d'huiles essentielles ou de médicaments phototoxiques qui vont causer une accumulation de substances photodynamiques (des pigments) dans l’organisme. Ces derniers passent la barrière digestive sans avoir subi de détoxification hépatique, vont être véhiculés par le sang jusqu’aux tissus cutanés et vont fluorescer au contact des UV en endommageant les cellules. Les lésions cutanées peuvent apparaitre partout, que ce soit sur la tête, les épaules, le dos, l’arrière main ou les membres du cheval.

Ici, la photographie d'une photosensibilisation primaire due à l'ingestion d'huiles essentielles.

(Cheval : Tayko, OI - Propriétaire : S.C)

Une coupable bien connue est le millepertuis à cause de l’hypericine contenue dans la plante.

Millepertuis, Hypericum perforatum.

PHOTOSENSIBILISATION PRIMAIRE – DE CONTACT :

La photosensibilisation de contact (aussi considérée comme une photosensibilisation primaire) et le fait de toucher directement une plante phototoxique. C’est la cause principale des brulures sur la tête et les membres (autour de la bouche, des naseaux et des yeux et/ou sur les paturons) très courantes chez les chevaux.

Cheval : Victor, 1 an, trait comtois OC - Propriétaire : S. Simard

Cheval : Alma de Morainval, 27 ans, SFB - Propriétaire : Florence

Les principales familles de plantes concernées sont les apiacées, anciennement appelées ombellifères à cause de la forme des fleurs sous formes d’ombrelle, les rutacées (= agrumes), les moracées (familles du mûrier blanc et du figuier) ainsi que les renonculacées (famille du bouton d’or). Soulignons que le millepertuis cause aussi de la photosensibilisation de contact.

Exemple d'apaicées, bien reconnaissables à leur forme d'ombrelle. Ici, ce sont des fleurs de carotte sauvage très courantes dans les prés.

Attention, une cause très courante de la photosensibilisation de contact est aussi…les produits insectifuges/insecticides ! L’été étant la saison ou les cavaliers aiment beaucoup badigeonner Gugus de produits anti-insectes à base de substances chimiques toxiques et, en plus du désastre écologique (tu sais, le fameux poisson qui flotte ou la tête de mort sur ta bouteille de pchit-pchit), qui sont souvent photosensibilisantes ou à base d’huiles essentielles (souvent mal dosées, mal utilisées ou de mauvaise qualité) telles que la citronelle.

Rajoutons aussi que beaucoup de crèmes et onguents à usages divers et variés (molettes hydratation, etc), notamment les gels à partir d’arnica, ont aussi des risques de photosensibilisation de contact.

PHOTOSENSIBILISATION SECONDAIRE :

La photosensibilisation secondaire est considérée comme la plus grave car elle touche la sphère hépatique. En règle générale, les pigments libérés par la digestion sont interceptés par le foie et éliminés dans la bile. Si ce système fonctionne mal et que l’organisme n’arrive pas à se dépurer d’une manière optimale, la phyllo-érythrine produite par la dégradation de la chlorophylle dans les intestins va saturer le foie qui n’assurera plus son rôle d’élimination et cela pourra aboutir (en plus des lésions cutanées n’importe ou sur le corps) à une atteinte hépatique.

Les quatre principales plantes concernées sont le trèfle hybride, le trèfle blanc, le lupin et la luzerne.

De gauche à droite : trèfle hybride, trèfle blanc et lupin.

Ce cas de figure est très souvent visible au printemps, quand le cheval a eu un fourrage riche en plantes citées ci-dessus en hiver.

Cheval : Rox, 8 ans, ONC - Propriétaire : A. Begnaud (cas assez spectaculaire d'une photosensibilisation secondaire avec atteinte hépatique due à la présence à haute dose de trèfle blanc dans du foin)

Cependant, la photosensibilisation secondaire ayant pour cause une intoxication du foie peut avoir d’autres origines : les moisissures d’un grain mal conservé, une surcharge hépatique due à un traitement lourd, etc.

Si un cheval présente des lésions cutanées sur le corps, qu’il est léthargique (manque d’énergie), perd du poids et a un ictère (le blanc des yeux devient jaune), alors on peut aisément confirmer qu’il y a une atteinte hépatique.

PHOTOALLERGIE :

La photoallergie dépend de la prédisposition de l’individu, de son terrain et de son immunité. Dans ce cas, une substance qui n’est pas toxique en elle-même va devenir photosensibilisante au contact des UV.

Une famille concernée est celle des astéracées avec la camomille, la chicorée ou le pissenlit.

De gauche à droite : chicorée et pissenlit.

Dans ce cas précis une approche de fond (et de longue haleine) est la plus adapté : travail sur la flore intestinale, l’immunité et un rééquilibrage énergétique en MTC (car une allergie est la conséquence d’un déséquilibrage énergétique).

POURQUOI MON CHEVAL ?

Vous l’aurez compris, un coup de soleil du à une photosensibilisation peut avoir différentes origines et suivant la cause apparaitre à divers endroits sur le corps. Bien évidemment, les chevaux à la peau dépigmentée ont plus de chances d’être touchés (c’est comme chez les humains) mais il serait faux de penser qu’un cheval à la peau noire n’est pas concerné !

Cheval : D'Lyo, 5 ans, pur-sang arabe - Propriétaire : E. Sniehotta

En plus du facteur « pigmentation de la peau », il y a le terrain, l’immunité et l’aspect énergétique du cheval qui jouent un rôle très important. Cela explique pourquoi, dans un même pré avec deux chevaux ayant des listes dépigmentées, seulement un des deux aura un coup de soleil en été.

PRISE EN CHARGE ET SOINS :

Dans tous les cas, en cas de lésions cutanées il est important de connaitre les premier gestes à faire (et à ne pas faire) :

• Ne plus exposer le cheval au soleil et aux rayons UV (box la journée, pré la nuit) et/ou mettre une protection physique (couverture/masque anti-UV) jusqu'a la disparition totale de la lésion.
  

• Identifier et enlever la cause de la photosensibilisation si c’est possible (médicament, produit insectifuge, plantes, etc). Par exemple, dans un pré rempli de millepertuis on change le cheval de pré et on travaille la pâture concernée en conséquence.
  

• Ne surtout pas enlever les croutes ! Elles constituent une barrière physique aux UV ainsi qu’aux bactéries et champignons. Si la peau « pèle » il est possible de l’aider en enlevant les peaux mortes qui ne sont plus attachées au derme, mais en aucun cas il ne faut tirer/frotter.
  

• Éviter d’utiliser des produits asséchants. Privilégiez l'utilisation de chlorhexidine à la polyvinylpyrrolidone iodée (type bétadine) ! La bétadine étant très asséchante et pouvant causer des brûlures si elle est trop utilisée, elle peut vite empirer l’état de notre coup de soleil. On va donc privilégier le nettoyage avec un savon doux à base de chlorhexidine s'il y a besoin d'un antiseptique, ou un savon surgras (un pain de savon à huile d'olive, au calendula, etc...en plus d'être efficace, le pain de savon est très écologique car il n'a pas d'emballage plastique !).

• Hydrater ! En externe, appliquer de l’aloé-vera (couper la plante et en appliquer directement le gel étant le plus efficace) sur toute la plaie. Ses vertus cicatrisantes et apaisantes vont rapidement faire effet. L'huile de souci officinal est aussi très efficace. En interne, ajouter une bonne cuillère à s. de sel dans l'alimentation (si vous ne le faites pas déjà) et s'assurer qu'il y aie de l'eau en quantité suffisante ! On ne le dit jamais assez, mais l'hydratation se fait d'abord en interne.

• Suivant la lésion, un anti-inflammatoire peut être intéressant. En gemmothérapie le macérât de cassis est un puissant cortisone-like intéressant dans ce cas précis.

• Si on soupçonne une photosensibilisation secondaire, un bilan hépatique ainsi qu’un drainage adapté (clique pour lire l'article sur les drainages) sont primordiaux, bien que tous les chevaux présentant un coup de soleil mériteraient de se voir administrer un drainage hépato-rénal. Si des lésions hépatiques sont confirmées il existe en phytothérapie deux plantes hépatoprotectrices et régénératrices du foie : le chardon-marie et le desmodium.

• En cas de photoallergie une application externe d'huile de plantain majeur ou lancéolé peut être très intéressant pour ses vertus anti-histaminique. Il est aussi possible d'en administrer en interne sous forme d'infusion.

• La visite d’un praticien shiatsu/MTC est intéressant afin de rééquilibrer l’organisme, d’agir en curatif sur la douleur et l’accélération de la guérison, ainsi qu’en préventif afin de diminuer les probabilités de récidive par la suite

Photo prise après le passage d'un vétérinaire afin de faire des analyses de peau + sang afin d'en savoir plus sur ce coup de soleil du à une photosensibilisation à cause indéterminée.

LA PREVENTION :

Comme vous le savez surement, le plus important est d'agir en préventif !

Un suivi régulier en shiatsu/MTC régulier (4 fois par an minimum) assurera un bon équilibre énergétique, une immunité efficace et une fonction optimale de tous les organes et viscères afin d'éviter tout développement de pathologie.

Les protection solaires sont très controversées tant d'un point de vue écologique que métabolique (petites particules qui pénètrent dans la peau)...il est plus économiques et "eco-friendly" d'utiliser une protection physique telle qu'un bonnet et/ou une couverture anti-mouche/anti-UV sur un cheval qui serait particulièrement sensible aux coups de soleil.

Eviter l'utilisation des produits anti-insectes en privilégiant les couvertures/bonnets et les pièges à taon (la fameuse boule noire) est aussi un bon moyen de préserver la nature et notre animal (eh oui, c'est NORMAL que notre cheval aie des mouches et des taons en été...).

Etre à jour au niveau des drainages est primordial. Un cheval ayant reçu un traitement chimique (médicaments, vermifuge, etc) aura plus de chance d'avoir des problèmes de photosensibilisation par la suite.

Soulignons aussi que le mieux reste une excellente gestion des pâtures ! En effet, une rotation régulière avec des ruminants et pas de surpâturage assure des zones de refus moins étendues et une meilleure biodiversité (ainsi, on ne se retrouve pas avec un champ de millepertuis). Si notre cheval a accès à suffisamment de zones ombragées (arbres, abris naturels et/ou artificiels) et qu'il a une surface suffisante afin de pouvoir manger ce qui est bon pour lui et pas uniquement "ce qui reste", alors on diminue drastiquement le risque de photosensibilisation.

Une cure de carottes à la fin de l’hiver fera plaisir à votre cheval et pourra préparer sa peau à l’exposition solaire grâce au bêtacarotène (j’en connait qui vont être content).

Par contre attention aux fleurs de carottes. Bien que la racine soit comestible et appréciée par le cheval, cette plante fait partie des apiacées (anciennement appelées ombellifères) et sa sève (tige, feuilles, fleurs) peuvent créer de la photosensibilisation de contact !

MAIS ENCORE ?

Nous avons dit que le Millepertuis était une puissante plante photosensibilisante à cause de l'hypericine qu'elle contient. Il est drôle de constater qu'en phytothérapie, l'huile solarisée de millepertuis est une grande alliée utilisée en externe pour les problèmes de peau, notamment pour les brûlures !

Ainsi, il n'est pas rare de conseiller d'appliquer de l'huile de millepertuis le soir sur des brûlures ou des coups de soleil et de bien se laver le lendemain matin pour ne pas faire de réaction de photosensibilisation la journée à cause de cette même huile.

Il serait donc envisageable de traiter les coups de soleil d'un cheval avec de l'huile solarisée de millepertuis à appliquer la nuit.

Attention toutefois à n'avoir AUCUN contact avec des UV (sortir le cheval quand le soleil est couché et le rentrer en box avant les premiers rayons de soleil) et de le laver au savon une fois la période de traitement terminée (après environ 15 jours d'application locale) en le gardant une semaine de plus à l'abri de la lumière la journée pour éviter que tout résidu de substance phototoxique ré-enclanche le problème.

Pour avoir une idée des différentes plantes présentes dans les familles, n'hésite pas à aller sur le blog de lafritillaire qui présente des nombreuses photos de qualité prises sur le terrain !