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Le fer - cet ennemi silencieux

Dernière mise à jour : 8 avr. 2023


Quand on commence à s’intéresser à l’alimentation équine, on devient vite un fada de la lecture des étiquettes des différents types de grains et de compléments alimentaires…et on se rend compte que c’est tout aussi hallucinant que la composition des croquettes pour chiens !


Entre ce qui est présent mais qui ne le devrait pas, ce qui devrait figurer mais ne figure pas, les quantités d’oligo-éléments qui sont écrites mais qui tiennent uniquement compte de ce qui a été rajouté sans considérer les quantité déjà présentes dans les aliments en-soi, la rareté absolue d’une alimentation BIO garantie sans pesticides, engrais ou OGM…bref, il y a de quoi avoir la migraine.


C’est ainsi que, sans le savoir et en pensant faire plaisir à notre compagnon qui hennit, on le nourrit au grain comme un oiseau et on le bourre de compléments alimentaires dont il n’a pas besoin…et qui l’intoxiquent.


J’ai décidé de parler aujourd’hui du fer, un oligo-élément présent en grande quantité dans l’alimentation équine et qui, malheureusement, peut être responsable de bien des dégâts.


LES QUANTITES :

Il faut savoir que l’apport en fer afin de couvrir les besoins du cheval est de 50mg/kg de matière sèche, soit environ 500 mg par jour pour un équidé de 500kg.


Or, dans son alimentation de base, ces doses sont souvent déjà largement dépassées avec environ 500mg/kg de matière sèche pour l’herbe et le foin. Pour peu que ce dernier aie un supplément de luzerne (sèche ou en bouchons), ce qui n’est pas rare car c’est un aliment peu chère et riche en protéines, il ingère 300mg/kg de matière sèche en plus par jour. On constate donc qu’un cheval nourri uniquement à l’herbe et au foin est déjà largement complémenté en fer.


LES CARENCES :

Dès lors qu’on se renseigne un minimum sur le taux de fer des aliments physiologiques du cheval, on se rend vite compte qu’à part un équidé ayant subi une grosse hémorragie (interne ou externe) il n’est pas possible de tomber en carence. Attention, nous parlons bien ici de carence en fer et pas d'anémie ! L'anémie étant un taux faible d'hémoglobine dans le sang et pas uniquement un manque de fer. Malheureusement, l'anthropomorphisme peut amener à penser qu'une jument, tout comme une femme, aurait plus souvent tendance à avoir une carence en fer...ce qui est faux vu que la jument, contrairement à la femme, n'a pas de règles (donc aucun problème de règles hémorragiques, etc) et par conséquent, aucune perte plus ou moins massive de sang tous les mois.


Oui, mais comment ce fait-il que les prises de sang des jeunes chevaux montrent souvent une carence en fer ?

Il faut savoir qu’un jeune cheval qui commence son entrainement va augmenter la quantité d’eau dans son sang afin de lutter contre la déshydratation. Ce processus naturel va donc diluer le sang, pas faire baisser la quantité de fer ! Avec le temps, l’organisme va s’habituer à un rythme de travail plus soutenu et cette « anémie » momentanée va disparaître comme elle est venue.


La dernière possibilité pour une carence serait…un excès ! En effet, un taux de fer beaucoup trop élevé va, paradoxalement, détériorer l’assimilation de ce dernier.


LES EXCES :

Un excès de fer, ce qui comme vous l’aurez compris est courant, amène à une mauvaise assimilation du cuivre et du zinc qui eux-mêmes ne permettront plus l’assimilation du fer…c’est le cercle vicieux de la carence par l’excès ! L’important dans ce cas est donc de diminuer la dose de fer dans l’alimentation et d’augmenter la dose de cuivre (qui va permettre une meilleure assimilation du fer). Un cheval en excès pourra montrer différents problèmes, voici une petite liste non-exhaustive : - immunité déficiente

- problèmes de pieds

- soucis tendineux

- une combustion accélérée de la vitamine E qui augmentera le risque de myosites (aussi appelé coup de sang)

- lésions musculaires

- insulino-résistance

A une dose toxique, c’est le foie qui va vraiment commencer à en souffrir.


DIAGNOSTIQUER UN EXCES DE FER :

Il est possible de se donner une idée de l’état du cheval rien que visuellement, en regardant comment se porte le système tégumentaire de ce dernier (corne, poils, crins). Le cuivre et le zinc étant des oligo-éléments essentiels pour la bonne assimilation de la biotine (elle-même primordiale pour le poil, la corne et les crins), il est donc assez logique que l’on voie les conséquences d’un excès de fer en observant les composants de ce système. Quand on observe les pieds, si la corne est striée en surface, qu’il y a des seimes persistantes malgré un parage adapté et/ou une pourriture de fourchette quasi chronique, alors il est fort probable qu’il y aie une carence en cuivre et en zinc due à un excès de fer.


Le bout des crins roussi et frisottant nous indique aussi un excès de fer :



Il en va de même avec les poils des chevaux noirs qui roussissent, souvent en hiver. Si cet aspect légèrement rouquin peut aussi être associé au gène « fading black » ou à l'exposition prolongée au soleil (ce qui n'est pas le cas en hiver dans ma région), parfois il est uniquement du à un excès de fer :

Une analyse de foin et un bilan nutritionnel est important afin de connaître les doses exactes de fer ingérées quotidiennement par le cheval et pouvoir réadapter l’alimentation au besoin.

Une analyse de poils/crins peut aussi être très utile afin de se rendre compte de l'état des lieux les mois précédents l’analyse : si l’alimentation et le mode de vie n’ont pas changé depuis les deux mois précédents l'examen, on peut considérer que les résultats sont encore valables. Attention toutefois au laboratoire choisi, suivant le traitement des échantillons ils peuvent facilement être contaminés et donner des résultats faussés.


L’analyse de sang afin de connaître les taux d’oligo-éléments étant très controversée, il n’est pas conseillé d’y avoir recours : suivant l’heure à laquelle la prise de sang a été effectuée les données peuvent changer dans une même journée. Une prise de sang faite avant ou après le travail ou l'alimentation du cheval, ainsi que le niveau de stress de ce dernier au moment de la prise de sang ont une influence non-négligeable sur les résultats.


QUELQUES CAS PARTICULIERS :

SME : Le syndrome métabolique équin, considérés pour certains comme une maladie et pour d'autre uniquement comme un métabolisme particulier (je fais partie de ce deuxième groupe de personnes), touche une grande majorité des chevaux de races dites "froides" (en d'autres termes, les poneys, espagnols, les américains, les traits...ceux qui sont faits pour "sucer des cailloux" !). On sait que ces chevaux, facilement en surpoids, sont insulino-résistants...Or le fer favorise cette insulino-résistance ! Pour ces individus en particulier, il est donc primordial de gérer au plus près la problématique du fer afin de limiter à tout prix son excès dans l'organisme.


PSSM : La myopathie à stockage de polysaccharides est une maladie génétique qui touche toutes les races de chevaux mais plus particulièrement les chevaux de trait et les races américaines (quarter horse, paint horse, appaloosa). La dégradation des muscles et les coups de sang faisant partie des symptômes de cette maladie mais étant aussi favorisés par un excès de fer, il est très important de faire attention à ce que ce dernier ne soit pas présent à haute dose dans l'alimentation.


Dermite : Cette allergie très courante due à un mauvais fonctionnement du système immunitaire libère beaucoup de toxines dans le corps et surcharge notamment le foie. Si ce dernier fonctionne déjà mal à cause d'un excès de fer (et son excès déséquilibre aussi le système immunitaire...cercle vicieux quand tu nous tiens...), il lui sera impossible de gérer les déchets emmenés par la dermite et cette dernière ne se verra qu'empirer malgré les divers traitements externes et/ou internes ! Afin de traiter au mieux une dermite, la gestion du fer est primordiale . Il est d'ailleurs courant de donner un mélange à base d'algues en cas de dermite, c'est bien, mais uniquement en petites cures discontinues. Le taux de fer dans les algues étant extrêmement élevé, si le cheval est déjà en excès dans son alimentation de base et qu'on lui en rajoute une bonne couche quotidiennement, à long terme, bonjour les dégâts.


A SAVOIR :

Certaines plantes (ou parties de ces dernières) comme l’ortie, le cumin, le gingembre, le son de blé ou la spiruline et les algues en général (liste non-exhaustive) sont riches en fer et il est courant de les voir dans l’alimentation équine. Elles participent indirectement à l’excès de cet oligo-élément déjà très présent dans la ration journalière.

Cependant, tout n’est pas blanc ou noir ! Bien que de les fournir toute l’année puisse être néfaste pour l’organisme, elles peuvent s’avérer intéressantes à donner en petites cures discontinues, durant des périodes précises de l’année et dans certains cas particuliers.


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